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lundi 27 avril 2020

Confinement: page 33

[...]

Le bus s’éloigna, elle était sur le quai de la gare routière, il lui restait plus de deux heures à tuer. L’autre inconvénient à habiter en montagne, c'était le manque d’horaires des lignes de bus. D’une, il ne fallait pas le rater, de deux, il fallait patienter une fois sur place. Ça ne lui déplaisait pas, elle allait dans ce cas à la médiathèque. La ville disposait d’un établissement fantastique, elle irait flâner dans les rayons, referait son stock de livres pour la semaine. Henriette lisait énormément, surtout depuis la retraite. Il n'était pas rare qu’elle ouvre trois livres en même temps, ça ne la dérangeait pas que les histoires s'emmêlent, vu que dans sa tête, c’était encore très clair.
Ludo lui avait conseillé de prendre une liseuse. Il avait voulu la lui acheter, elle avait refusé catégoriquement. Il n'était pas encore né celui qui arriverait à la convaincre de lire sur ces tablettes électroniques sans vie. Non, un livre, il fallait le toucher, le palper. Il fallait l’avoir en main, le peser. L’ouvrir, le retourner, l’aérer. L’éplucher avant de l’acheter, le décortiquer minutieusement une fois chez soi. Le caresser, le humer, l’attendrir, davantage chaque fois qu’on l’ouvrait. Un livre, c'était un objet qui vivait, qui grandissait, qui avait besoin d’un lecteur, comme le lecteur avait besoin de lui. Ce machin électronique, il ne donnait rien. Probablement un peu de plaisir en y offrant quelques mots, mais pas davantage. Rien ne remplacerait jamais l’objet livre. La petite avait exactement le même avis qu’elle là-dessus, raison de plus pour ne pas changer son point de vue.
A dix-huit heures, elle était en gare, sur la voie une. Elle tendit l’oreille, essayant de percevoir les ronflements du train. Son cœur s’accéléra, elle était impatiente de la voir descendre d’un wagon. De la découvrir au milieu de la foule, la voir courir vers elle avec son sourire magnifique, ses cheveux bruns se balançant dans l’air.
Le train arriva, s’arrêta. Elle avait essayé de deviner le wagon, c'était un jeu qu’elles faisaient toujours. Si Henriette arrivait à deviner d’où elle sortirait, la petite lui offrirait une glace. Le cas contraire, c'était Henriette qui la lui offrait. Dans les deux cas, elles étaient gagnantes, elles auraient droit à la glace.
Les roues de fer crissèrent, le train se figea. Les portes s’ouvrirent, les passagers descendirent sur le quai. Elle descendit du wagon de derrière.
Fidèle à son habitude, elle n’avait pas de lourds bagages, juste un sac à dos rempli de l’essentiel.
– Je te soupçonne de me voir et de changer de wagon au moment de descendre, grommela Henriette.
– Moi aussi, je suis heureuse de te voir, lui fit la jeune fille. Et oui, j’ai fait bon voyage, non, je ne suis pas trop fatiguée par ces nombreux kilomètres qu’il m’a fallu parcourir pour te rejoindre. Et puis de toute façon, même lorsque tu gagnes, tu ne veux pas que je t’offre la glace.
– Ce n’est pas faux, mais au moins, j’ai la satisfaction d’avoir gagné.
Henriette la serra fort dans ses bras.
– Tu as encore grandi, toi ! s’exclama-t-elle.
– Mamie, je t’ai déjà dit que je ne grandissais plus depuis un an. J’ai déjà ma taille adulte.
– Alors c’est moi qui rapetisse. Qu’est-ce que je suis heureuse de te voir.
– Ah, me voilà rassurée. A un moment, j’en ai douté. Bon, tu me l’offres, cette glace ?!
– Tu ne perds pas le Nord, toi…

Lorsqu'elles revinrent à la maison et que la petite vit sa mamie descendre la poignée sans insérer de clé dans la serrure, elle soupira.
– Tu as une bonne étoile, toi, tu sais ? Tu n'imagines pas le nombre de cambriolages qu'il peut y avoir en ville.
– J'habite en campagne, lui répondit la vieille dame.
– Il y en a également en campagne. Et tu n'es pas réellement en campagne. L'endroit où tu habites, ça s'appelle désormais un village.
– Ah bon ? fit-elle innocemment. Pourtant, quand je me suis installée ici, il n'y avait que des prés tout autour. Ah, l'évolution...
– Ah, l'obstination, rajouta l'autre.
– Figure-toi que j'y ai quand même pensé.
– Ça, je n'en doute pas. J'imagine que c'était quand tu étais dans le bus ?
– Presque. En y descendant.
– Tu es un cauchemar, Mamie.
– Je sais, Maurice ne cessait de me le répéter. Qu'il n'avait jamais rencontré une mule pareille.
– Je ne lui donnerai pas tort.
– En y repensant, je suppose qu'il y a un gêne d'équidé, dans la famille.
– Pourquoi dis-tu ça ?
– Parce que ma fille est un âne.
Elles pouffèrent.



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