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jeudi 27 août 2020

L'échappée Belle (2ème partie)

-Trrriiit ! (Onomatopée du bruit de sifflet).
-Glp (j'avale ma dernière bouchée de petit déj)
Pfff pfff pfff (là je cours)
En gros, j'étais partie pour ma nouvelle aventure. A quatre heures du matin, je me sentais frais comme un gardon (hors de l'eau depuis trop longtemps), les yeux grand ouverts par l'adrénaline (surtout pour essayer de voir dans le noir), prêt à savoir ce que le bonhomme avait dans le ventre.



Les deux premières heures n'ont pas été évidentes, non pas à cause de la nuit, mais plutôt à cause de ma mini frontale qui n'éclairait absolument rien. Bien sûr, je ne l'avais pas testée, je l'avais prise pour son poids et son faible encombrement, le sac étant déjà bien chargé, j'avais optimisé les grammes. J'avais juste prévu de faire les dernières heures de nuit avec, la garder la journée dans le sac (matériel obligatoire), puis la troquer contre une autre à la tombée de la nuit. Je n'avais rien laissé au hasard, sauf ma connerie (désolé pour les yeux sensibles, y'a pas d'autre mot).
Heureusement, la première partie de course était en profil montant, et j'ai pu arriver sans encombre, les chevilles intactes, au premier ravitaillement. Nous étions alors 4 en tête. Je prends le temps de me recharger en eau, avale deux cr'oc et go, je repars en quatrième position. Pendant le ravito, deux coureurs se sont fait la malle, j'ai beau me dire que la course est longue, j'ai déjà peur d'avoir loupé la bonne échappée.


Puis les bornes s'enchaînent, les ravitos aussi. Je retrouve Cédric sur nombre d'entre eux, je croise Luc, venu m'encourager à de nombreux points du parcours, débordant d'énergie, tout sourire, et je suis heureux d'être là, même si avec mes talents aérien de pachyderme, je galère dans chaque descente. Malgré tout, chemin faisant, j'arrive au Pleynet, presque à mi-course, en deuxième position. Je me dis que le plus dur est fait. Déjà 5500 mètres de dénivelé positif, presque 70 bornes, tout va bien, je gère, je gère.


Je prends alors mon premier coup de chaud, lors de la montée au chalet de Grande Valloire. La température est caniculaire, je rêve de neige, de froid, de glaciers, mais le soleil de plomb me ramène à la dure réalité. La montre indique douze heures d'effort, j'attends patiemment que ce coup de pompe passe rapidement, j'ai hâte de rejoindre le ravitaillement de Gleysin, où m'attendent Cédric et Benjamin.
Benjamin, c'est mon Pacer. Mon quoi?!
Mon Pacer. La première fois que j'ai entendu ce mot, j'ai fait comme si je connaissais, pour ne pas paraître stupide en face de mon interlocuteur. En douce, j'étais allé chercher la définition dans la bible du Traileur. 
Pacer  /ˈpeɪsə/  nom masculin: meneur de train.
Le pacer est la personne qui va accompagner le traileur durant une partie de la course, l'aider à surmonter les moments difficiles, le remotiver, le calmer lors des moments d'euphorie, le canaliser, lui donner la paix intérieure.
Benjamin sortait de convalescence, une cheville en vrac pendant plusieurs semaines. Il avait accepté de m'accompagner, m'avait proposé les 40 derniers kilomètres, j'avais insisté pour 70, par peur de me retrouver seul en début de nuit, et surtout dans le fameux col de Morétan.
Il n'y avait pas pire pour lui pour démarrer: nous étions au pied d'une ascension de 1400 mètres, en plein cagnard, au moment du goûter, et l'une des portions les plus techniques du parcours: pas de chemin, mais des blocs de rochers à gravier, un névé à descendre, puis rebelote, pierres, pierres et encore pierres. D'autant plus que j'avais près d'une heure d'avance sur notre timing prévisionnel, qu'il n'avait rien eu le temps d'avaler. Pour ma part, après une longue pause au ravitaillement, j'entamais un moment d'euphorie. Je me suis rapidement retrouvé seul, Benjamin galérant avec sa cheville incertaine et les trop nombreux cailloux, j'ai rattrapé mon 1/4 d'heure de retard sur mes deux plus proches concurrents, j'avais avalé le Morétan en un instant, j'étais au ravitaillement de Périoule, la nuit commençait gentiment à tomber et je me disais que la victoire était vraiment possible.

lundi 24 août 2020

L'échappée Belle (1ère partie)

Pour moi, la course a réellement commencé deux semaines avant l'épreuve, lorsque, après avoir terminé quelques cycles de bons entraînements, entre sorties à pied, vélo et ski à roulettes, j'ai pris un peu de repos pour "faire du jus", comme on dit dans le jargon sportif. Bizarrement, durant ces deux semaines à faire du jus, le cardio n'avait jamais été aussi haut. Parce qu'il y a un élément essentiel auquel je n'avais pas prêté attention jusqu'alors: le STRESS! Eh oui, je partais dans l'inconnue la plus totale, ma seule et précédente expérience sur un format "long" étant un 76km avec 2000 mètres de positif sur la SaintéLyon. 6 heures de course (avec crampes dès la moitié).  Là, je m'embarquais sur 150km, 11 400 de positif et minimum 25 heures de course, sur une des épreuves les plus techniques et difficiles du continent. L'Everest, en quelque sorte, pour moi qui n'avais jamais gravi que la colline en face de chez moi.
Pourtant, une fois n'est pas coutume, j'avais essayé d'anticiper. J'étais même allé faire une reconnaissance en famille, sur une jolie rando autour des Sept Laux.
Pause photos lors de notre rando:

Avec un sac de la taille des enfants!

Sauvage et minéral

Descente sur les Sept Laux

Mais revenons à notre histoire...
J'ai préparé mon sac dix fois, je me suis fait dix mille scénarios possibles, réveillé toutes les nuits en hurlant "c'est où l'arrivée, c'est où l'arrivée?!", couru en dormant, bref, pour moi, l'expression "faire du jus" n'avait jamais été aussi loin de la vérité, le jus, je le perdais plus que je ne le faisais.
M'enfin, les jours ont fini par passer avec en ligne de mire le grand départ. Cédric Revillard (que je ne remercierai jamais assez pour sa disponibilité) m'avait gentiment proposé de m'accompagner pour faire mon ravitaillement et je n'ai pas fait la fine bouche, connaissant ses talents de chocolatier pâtissier, il valait mieux être bien accompagné sur cette épreuve. J'allais pouvoir manger du Cr'oc and go... à gogo.
Le jeudi en fin d'après-midi, j'ai chargé mes affaires dans la voiture de Cédric, direction Vizille pour planter la tente près du départ. Le thermomètre affichait 36 degrés, moi qui affectionne le froid et la neige,  pas de doute, j'étais dans mon élément.
On a planté les tentes, et j'ai fait la grimace en mettant mon réveil à 3h30 du matin. Entre la chaleur et l'appréhension de la course, pas évident de trouver le sommeil, d'autant plus qu'un hurluberlu s'est mis à jouer de la flûte au moment de s'endormir, du coup, j'ai rêvé de rats toute la nuit (Cf Joueur de flûte de Hamelin, pour ceux qui ne connaissent pas). En fait, je n'avais qu'une hâte, que le réveil sonne et que je puisse enfin en découdre.
Ce n'est pas le réveil qui m'a sorti de mes songes, mais la sono de la course. La montre affichait 3h20, j'avais quand même réussi à dormir, aucun rat ne m'avait dévoré les orteils, amen, j'allais pouvoir courir.
Par contre, je n'avais toujours pas mon dossard. A 3h45, on me dit qu'il est au départ. A 3h50, on me dit qu'il est dans le gymnase. Bon, je ne bouge plus, j'attends, je sens l'adrénaline qui monte, je vais faire quoi sans dossard? D'autant plus que Cédric doit récupérer son bracelet accompagnant et qu'il faut aussi récupérer le dossard du "Pacer" (mot découvert à l'occasion de ce trail, je n'en avais jamais entendu parler auparavant).
Enfin, à moins de 5mn du départ, j'ai mon sésame, je peux finir mon petit déj tranquillement sur la ligne en attendant que le coup de fusil retentisse.  

samedi 1 août 2020

Entraînements longs et podium au Trail de Megève

Comme vous le savez désormais si vous vous perdez de temps en temps sur ce site, j'ai choisi cette année de m'aligner sur l'Echappée Belle, qui sera mon premier Ultra Trail. J'enchaîne les heures (33 heures pour ma plus grosse semaine il y a deux semaines) et des grandes sorties. Dimanche dernier, c'était au tour de la traversée des Aravis en empruntant une grosse partie du GR 96, soit une virée d'un peu plus de 65km pour 3500 de D+, pour rallier la maison à Sallanches.
Un peu patraque, j'ai pris le départ à 7h30. Une petite grimpette en direction des Glières, un site que je connais bien plus l'hiver que l'été, avant de redescendre sur Entremont. L'estomac a du mal à avaler de la nourriture, je poursuis mon bonhomme de chemin en direction du col de la Forclaz

Je laisse derrière moi le plateau des Auges avec les Glières sur la droite des crêtes



 qui me mène ensuite au lac de Lessy. 


Je bascule ensuite en direction du Chinaillon

 
le sentier que j'emprunte est laborieux et glissant, et me voilà ensuite sur un gros chemin carrossable qui me mène au Col des Annes. 


J'en suis à un peu plus de cinq heures de course à pied et quarante bornes. L'estomac est toujours contracté, je n'ai quasiment rien avalé depuis le départ, et je me dis bien qu'à un moment donné, le corps va bien me le rendre.
A part les vues, le GR96 n'est pas grandiose, trop de chemins carrossables. C'est bien plus agréables sur les hauteurs du Reposoir


et la vue est magnifique lorsque je bascule de l'autre côté de la chaîne des Aravis avec le Mont Blanc en arrière plan. 


Le sentier est ensuite mal balisé (une clôture de bétail barre l'accès aux Chalets de Vormy et je me retrouve dans la cambrousse, avant de rebrousser chemin. Fidèle à moi-même, je n'avais pas de carte pour vérifier mon itinéraire). Je descends ensuite le passage du Saix, assez laborieux (comme quoi, le [SEX] a ses limites -jeu de mots facile, je vous l'accorde-) et aux Chalets de Mont Ferron, avec mon petit plantage, je n'ai plus le temps de remonter sur les Chalets de Doran, itinéraire qui aurait dû m'amener directement à Sallanches, mais termine ma course à Magland où la petite famille m'attend. Un peu rôti, vous en conviendrez. Et bien entendu -jamais deux sans trois- comme pour mes deux dernières grosses sorties, je termine par un interminable bitume.

C'était la sortie du dimanche. Et puis après quelques autres entraînements casse-pattes, j'ai mis le dossard aujourd'hui à Megève. Mon premier de l'été. Un premier août. Cette année, fallait être patient pour se mettre une grosse transpirée.
Je termine 3ème. C'est pas la gagne, je sais, mais ça reste un podium. Je vais pas faire la fine bouche.



Désormais, je compte les jours, je suis passé sous la barre des 20.
20 jours avant les Belledonne.