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vendredi 17 avril 2020

Confinement: page 25

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Alors il a pris un tournevis, de la colle à bois, du fil et une aiguille, il s’est mis à démonter, réparer, coller, rapiécer, recoudre, il a décidé qu’il ne jetterait plus, qu’il ne nourrirait plus les multinationales dévorantes.
J’aimerais dire que tout ça, c’est la faute du quincaillier, ça me donnerait une raison de de détester davantage le commerçant, qui a bien entendu une part de responsabilité dans tout ça, mais mon mari était simplement devenu fou, une folie douce, pas méchante, la retraite lui avait grillé ses neurones, il avait perdu ses fondamentaux, je vivais avec un gamin irresponsable. Aussi bien, aujourd’hui, il est en train de poursuive sa régression, et je le retrouverai un jour, totalement immature, au stade de l’enfance. Comme dans ce film, là, où le héros naît vieillard et traverse les années en rajeunissant.

Je sonne à la porte, Xavier ouvre en me souriant.
– Arrête de sourire, lui dis-je, sinon, je repars toute la foulée.
– Tu devrais essayer. Tu sais que l’action de sourire, envoie des messages positifs au cerveau ? Le fait d'actionner les muscles qui font sourire libère les endorphines et donne donne une sensation de bien être. Il suffit de se forcer à sourire pour être mieux dans sa peau.
Xavier est mon homme de compagnie. Il le sait, ne s’en offusque pas. Je comble son statut de veuf une fois par semaine. C’est un bel homme, épargné par l’âge. Il n’est pas spécialement intelligent, mais ça m’arrange, pour partager un bon moment dans un lit, il est inutile d’être avec Einstein. A soixante-cinq ans, j’aime profiter des plaisirs de la chair, je ne suis pas encore nonne. J’exploite les passe-temps que mon corps peut m’offrir. Parfois, je passe une nuit ici, je repars au matin, avant le petit-déjeuner, pour m’éviter des conversations matinales déplacées. Je suis du genre à me lever du pied gauche.

Il est allongé sur le dos, l’odeur de la cigarette me réveille. Je tends la main et lui prend le mégot incandescent, je gonfle mes poumons, j’inspire l’air mélangé de tabac. L’oxygène fait crépiter la braise au bout de la tige blanche, que c’est bon. Je forme un cercle avec ma bouche et souffle des halos de fumée.
– Tu sais que l’OMS est en train de tirer la sonnette d’alarme ?
– De quoi tu parles ?
– Bah, du virus, fait-il comme si c’était évident.
– Faut préciser, je ne suis pas devin.
– Désolé, s’excuse-t-il. J’ai lu ça dans le journal ce matin. Un méchant virus, à ce qu’il paraît, qui est en train de s’étendre à grande vitesse.
– Les chinois sont trop nombreux, leur pays trop petit, ça leur fera une cure de jouvence.
– Ce que tu peux être méchante.
– Méchante ? Méchante de quoi ? Regarde la vie qu’ils ont ?! Ils habitent dans des mégalopoles si polluées qu’ils ne voient même plus la couleur du ciel.
Il me dit que oui, c’est un fait et qu’il y a des millions de mort là-bas à cause des émissions de particules, fines ou lourdes. Qu’il a lu que là-bas, beaucoup de villes se chauffaient encore au charbon, que c’est pour ça qu’il y a un gros voile jaunâtre au-dessus des cités. Je le laisse parler sans l’écouter, comme si sa voix était une douce musique. Il a une jolie voix grave, sonore, qui fait vibrer tous les objets qu’il y a autour.
Il est à la retraite, lui aussi. Il a travaillé toute sa vie comme mécanicien dans une usine de décolletage, à faire des réglages sur les machines, à venir les secourir lorsqu’elles tombaient en panne. Il rigole en disant qu’il était le médecin des usines, il sauvait les vies de machines. Moi, j’étais comptable, j’ai sauvé les vies des entreprises en leur évitant la faillite. Comme quoi, tout le monde sauve des vies.



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