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dimanche 26 avril 2020

confinement: page 32

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Pour le reste de la semaine, Henriette n’avait rien prévu, rien organisé. Elle laisserait comme toujours la place à la spontanéité, au hasard, aux envies du moment. Il n’y avait que les rencontres qui se planifiaient, savoir à quelle heure et quel endroit, pour le reste, elle laissait la providence faire son travail. Elle savait que la petite aimait ça, c'était un jeu auquel elle se prêtait volontiers. Jamais elle ne s’était plainte du manque de rigueur de sa mamie, de ce côté marginal, un peu fouillis. La dernière fois, lorsqu’elles s'étaient appelées, elle lui avait dit que c’était elle, qu’elle ne devait rien changer, surtout pas cette authenticité.
Le bus traversa la campagne, bien que de campagne, il ne restât plus grand-chose de ces espaces verdoyants et déserts. Ç'avait été le cas à la fin du siècle dernier. Dans les années soixante-dix, quatre-vingt, les champs avaient commencé à bien se vendre, les agriculteurs avaient trouvé un filon, il valait mieux transformer leurs parcelles en habitable et y faire pousser des maisons plutôt que de continuer les exploitations au tracteur pour y faire pousser des céréales et des légumes, ou y mettre en pâtures les vaches.
Les villages s'étaient agrandis. Au début des années 2000, les lopins valaient de l’or, le département était attrayant. Les montagnes – surtout le ski l’hiver – en avaient fait une terre prisée.
Henriette aimait bien sa vie d’avant, les routes peu fréquentées, le silence du soir. La petite lui dirait qu’à cette époque, il aurait été bien difficile de vivre sans voiture. Et elle aurait fichtrement raison.
Henriette regardait le paysage défiler, s’immobiliser lorsque le bus s’arrêtait. Elle était nostalgique, elle l’avait toujours été, ce genre de choses ne changeait pas en vieillissant. Elle n’aimait pas l’évolution, elle avait la certitude que les plus belles années étaient derrière, qu’il y avait eu un âge d’or, entre les années quatre-vingts et les années deux mille.
Pour elle, comme pour la vie alentour.
En quatre-vingts, elle avait quarante-cinq ans, Maurice et elle terminaient de retaper la ferme, leur fille unique avait quitté la maison, elle avait apprécié de se retrouver, seuls, elle et son mari. Ils avaient de nombreux projets. Simples.
Elle était heureuse, un bonheur sans concession.
Elle se dit que Maurice lui manquait. Ça ne durerait qu’un temps, bientôt, elle irait le rejoindre. Il resterait encore de délicieux jours à vivre, mais les plus beaux, oui, ils étaient derrière.
Il y eut plusieurs kilomètres sans habitation avant de voir naître les premières maisons ceinturant la grosse ville. Puis les grands immeubles. Le bus marqua de nombreux stops aux feux, aux passages piétons. Il y avait du monde sur les trottoirs. C'était l’heure de la sortie des classes, les enfants tenaient la main de leur parent, beaucoup n'avaient qu’un pull, pas de veste, il faisait chaud, et le soleil, fin février, commençait à être haut dans le ciel, il chauffait davantage qu’au mois de décembre. Il avait fait vingt degrés, aujourd’hui.
Vingt degrés, en février.
Ma vieille, si je t’entends encore penser une seule fois qu’on n’aurait jamais vu de telles températures quand tu étais petite, je...
Je quoi ? se répond-elle.
Je te noie. Je t’assomme. Je t’étripe.
C’est ça, essaie toujours !
Elle rigola toute seule.



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