Ce
matin, dans le bus, le chauffeur avait mis la radio. La radio, je
l'appelle la boîte à mauvaises nouvelles. Comme la télé. Comme
toutes les informations de masse, parce que les médias veulent du
spectaculaire, et le spectaculaire, c'est ce qui fait peur, et la
peur, c'est une émotion qui permet de cadrer l'être humain, éviter
qu'il ne s'émancipe trop, qu'il sache que la mort rôde toujours
dans le coin, et que c'est grâce aux dirigeants qui font les lois,
qui réprimandent et qui punissent, que l'on a droit à une vie
meilleure. Il y a une dépendance, sans la peur, ce serait
l'anarchie, parce que la plupart d'entre nous agiraient comme bon
leur semble, en faisant fi des lois, du respect de l'autre. Parce
que nous sommes égocentriques, c'est indéniable. Je sais, j'ai une
mauvaise image de nous, mais une citation de Victor Hugo est très
appropriée, elle dit : « Mes amis, retenez ceci, il n'y a
ni mauvaises herbes ni mauvais hommes. Il n'y a que des mauvais
cultivateurs ». Nous sommes tous fautifs et nous n'apprenons
pas suffisamment les valeurs essentielles à la vie : le
partage, l'altruisme, le respect de l'autre, l'amour. Nous sommes
englués dans notre quotidien, dans notre désir de profiter de la
vie sans faire de concession, de consommer, parce que là aussi, la
mort nous guette au loin, et que, inconsciemment, nous voulons tout,
tout de suite, lors de notre passage sur cette Terre.
Ce
matin, j'ai eu peur, lorsqu'il a été question d'un nouveau Virus.
Pourtant, c'est un classique, et ce depuis la nuit des temps. Les
virus sont vieux comme le Monde, ils existent depuis des milliards
d'années, ce sont les premiers organismes à être dotés d'un ARN.
Des sortes de parasites qui ont besoin d'un hôte à infecter pour se
développer. Sais-tu que nous en avalons des milliards chaque jour ?
Comme les bactéries ? Et que comme elles, beaucoup sont
bénéfiques pour notre corps ?
Mais
lorsqu'on parle de Virus aux informations, ce n'est jamais bon.
J'espère
qu'il ne va pas monopoliser les médias ces prochains jours, sinon,
c'est mauvais signe.
Bon,
je te laisse, là il est vraiment tard, mon réveil indique qu'il est
deux heures du matin et même si je ne suis pas une grande dormeuse,
mes yeux me piquent.
Je
t'aime
*
Il observa son image dans la glace. Son visage un peu joufflu, encore
gonflé par le sommeil. Les rides au coin de ses yeux, ses cheveux
noirs, parsemés de quelques blancs. Il se trouva beau, sourit à son
reflet, se dit qu'il avait de la chance, que rien ne manquait à sa
vie. Il avait fait refaire la salle de bain le mois dernier, et
franchement, c'était une réussite. Ça leur prenait de temps en
temps, avec Sandra. Le besoin de refaire peau neuve, de changer une
partie de la maison, comme on change un vêtement sale ou usé, de le
troquer pour quelque chose de plus soyeux, au goût du jour.
Bertrand avait un bon salaire, il pouvait se permettre ce genre de
choses. Un temps, Sandra s'était posé la question de continuer à
travailler, surtout après la naissance de Jules, mais elle s'était
dit que les journées deviendraient vite longues, entre ces quatre
murs. Ils avaient alors opté pour une nounou pour garder leur enfant
pendant leurs heures de boulot. Ils avaient une femme de ménage,
donc à part quelques tâches ménagères, la préparation d'un repas
de temps à autre (c'était assez rare, la plupart du temps, c'était
des plats déjà cuisinés, une livraison à domicile ou alors un
restaurant, pour prendre l'air), ils étaient disponibles à plein
temps dès le retour du boulot.
Il s'aspergea énergiquement le visage à l'eau froide, regarda l'eau
s'écouler dans le siphon, ferma le robinet et s'essuya. La salle de
bain était parfaitement rangée, Sandra ne tarderait pas à venir
elle aussi, se plaçant à côté de lui, en face de son lavabo, de
son miroir. Ils avaient tous deux leur espace, de cette manière, ils
pouvaient se préparer en même temps sans attendre que l'autre ait
terminé. L'avantage de vivre dans un grand appartement et d'avoir
suffisamment de place pour ne pas se marcher dessus.
Sandra arriva, l'embrassa rapidement sur la joue, et se plaça à ses
côtés pour effectuer les mêmes gestes, les mêmes observations.
Elle coiffa rapidement ses cheveux bruns, coupés au carré, releva
ses cils avec du mascara, un peu de fond de teint sur les joues pour
se donner bonne mine. Pinça ses lèvres et hésita à les souligner,
se dit que non, le rouge aux lèvres, elle n'était pas fan. Se
claqua gentiment les pommettes pour leur donner du tonus, et disparut
pour aller lever le petit.
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