[...]
*
Un ballon traverse la route devant moi. Un garçon d'une dizaine
d'années lui court après. J'arrête la voiture et baisse la fenêtre
pour l'interpeller.
–
Tu as de la chance, je ne roulais
pas vite. A ton âge, tu devrais savoir qu'il faut regarder avant de
traverser.
–
Je l'ai fait, m'dame, me dit-il.
J'ai vu que vous arriviez doucement.
Sa réflexion m'agace.
–
Tu n'as rien à faire sur la route,
et les ballons, leur place est dans un stade. C'est à cause des
enfants comme toi qu'il y a des accidents dans les villages.
–
Je n'ai pas fait exprès. Je jouais
dans la cour avec un copain, et il est passé au-dessus de ma
barrière.
Je lui répète que sur un stade, ce genre de choses n'arriverait
pas. Il hausse les épaules et s'éclipse avec son ballon.
Je supporte de moins en moins cette jeunesse irrespectueuse, encore
moins les parents qui laissent les gamins livrés à eux-mêmes. Ils
feraient mieux d'aller aider leurs parents, et les parents feraient
mieux de leur donner du travail.
J'enclenche la première et poursuis ma route. Ce matin, je suis
allée faire des courses à la supérette. Il y a eu un changement de
gérance, je n'aime pas le nouveau, il sourit trop, et les gens qui
sourient trop, c'est pas bon. Il y a une arnaque quelque part.
Heureusement, les produits n'ont pas augmenté, sans quoi il m'aurait
entendu. C'est déjà suffisamment cher comme ça.Heureusement, les produits n'ont pas augmenté, sans quoi il m'aurait
entendu. C'est déjà suffisamment cher comme ça.
J'appuie sur la télécommande lorsque j'arrive devant le garage, la
porte s'ouvre automatiquement. Je range la voiture et ressort avec
mon panier. Il n'est pas très lourd, je fais les courses chaque jour
pour m'éviter cette contrainte : avoir des sacs encombrants et
difficiles à transporter. Les déplacements en voiture facilitent la
tâche, Louis me disait que j'utilisais la voiture pour pas
grand-chose, il avait tout le temps un truc à redire sur mon
fonctionnement. Les lampes allumées, les trajets en voiture, le
lave-vaisselle mal rempli, le lave-linge à moitié vide. Des sujets
de dispute constants, surtout après sa retraite. Il était devenu
insupportable. Il y a quatre ans, il est parti. Il a fermé une
dernière fois la porte, traînant derrière lui une petite valise
avec l'essentiel. Il avait laissé tout le reste, disant qu'il n'en
avait pas besoin, qu'il n'y avait qu'à le donner au secours
populaire. Il voulait prendre un nouveau départ, se contenter du
minimum, le changement, c'est pour maintenant, avait-il dit en me
quittant. Il m'a abandonnée d'un signe de la main. Me laissant
l'appartement.
–
Tu as rencontré quelqu'un ?
lui avais-je demandé.
–
Oui, la raison.
–
T'as raison ! l'avais-je
raillé. La folie, oui ! La raison
t'aurait incité à rester.
–
Et toi, à changer.
–
Question de point de vue.
–
Effectivement, et nos points de vue
divergent. La séparation, c'est lorsque nous ne sommes plus capables
de nous entendre sur les choses essentielles de la vie.
Je l'avais regardé disparaître dans les escaliers. Il avait même
délaissé l'ascenseur, Môssieur pensait qu'il fallait faire
attention à toutes ces choses ridicules du quotidien, chaque démarche
personnelle pouvait engendrer une démarche collective. Éteindre les
lumières, se déplacer à pied ou à vélo. Qu'en plus, notre corps
nous remercierait. Plus d'activités, donc moins de problèmes
cardio-vasculaires. Môssieur était devenu philanthrope, écolo,
réactionnaire. Môssieur était devenu penseur et fourmillait de
bonnes pensées. Moi, je n'étais qu'une idiote. Non, m'avait-il dit,
un jour, peu avant la séparation. Tu ne veux simplement pas changer,
ni sortir de ta zone de confort.
bonjour benoit
RépondreSupprimertu as une sacree imagination, je te te lit tout les jours comme je ne travaille plus, chantier arrete, on put encore skier au glieres on est confine en attendant des jours meilleurs