[...]
Jeanne boude à son tour. Elle s'arrête et croise ses bras.
– C'est pas juste d'être petite, je peux rien faire alors que
Louise elle a tous les droits.
– Mais tu vas grandir, la rassure Yoann, et tu pourras tout faire
comme ta sœur.
Jeanne ne veut rien savoir.
– Allez, s'il vous plaît les filles, ne commencez pas. Pas
maintenant. Quand c'est pas l'une, c'est l'autre. A croire que vous
vous donnez le mot. J'ai eu une dure journée, donnez-moi au moins un
petit sourire, dites-moi que vous êtes contentes de me voir,
contentes de rentrer à la maison, d'être en week-end.
Il soupire, la prochaine fois, se dit-il, je tournerai sept fois la
langue dans ma bouche et réfléchirai avant de parler.
Le caprice se termine lorsqu'ils arrivent dans la voiture.
– La musique, la musique, la musique ! clament-elle ensemble.
– D'accord, d'accord. Mais on se calme.
Il tourne le bouton, cherche une fréquence.
– Non, pas celle-là ! On veut la musique de la reine des
neiges.
Résigné, il charge le CD dans le lecteur, appuie sur lecture.
Les hauts-parleurs diffusent
l'introduction musicale de Disney.
– Je veux la musique des trolls !
fait Jeanne.
– Celle avec Olaf ! rectifie sa sœur.
Elles se mettent à hurler, Yoann pile et arrête la voiture.
– Si ça continue, explose Yoann, vous finissez à pied.
Louise se met alors à pleurer, suivie rapidement par sa sœur.
– Et allez, c'est reparti, marmonne Yoann. Faites des enfants,
qu'ils disaient, faites des enfants...
– C'est agréable, ce silence, lui dit-il lorsqu'ils sont en train
de nettoyer la cuisine.
Les filles sont dans leur chambre. Jeanne et Louise dorment déjà,
Aurore est en train de travailler.
– Des fois, je me dis que le meilleur moment de la journée, c'est
quand elles sont au lit, rigole-t-elle.
Ce soir, c'était la tempête durant le repas. Elles n'ont pas cessé
de s'asticoter, signe que la journée à l'école a été éprouvante.
Demain, ils annoncent la neige, les enfants doivent le sentir, à
chaque fois ils sont dans une excitation incroyable.
– Tu as entendu ? reprend-il en donnant un dernier coup
d'éponge sur la table, le virus a fait des morts, en Chine.
– C'était à s'en douter. Quand on commence à parler d'un virus
dans les médias, c'est qu'il y a forcément eu au moins un mort. Tu
sais leur entêtement à diffuser du sensationnel.
– Ils pourraient parler dans ce cas des génocides en Afrique, des
glissements de terrain en Bolivie...
– C'est devenu trop commun. Les gens s'en lassent, et puis, tu sais
bien, tant que ça ne les touche pas directement...
– J'ai vu Jean-Marc en allant
chercher les filles. Je lui ai proposé de faire un repas, un de ces
soirs. J'ai suggéré que vous nous organisiez ça entre femmes.
– Ça veut dire quoi
« entre femmes » ?
– Bah tu sais bien, si je commence à entreprendre une quelconque
organisation avec lui, finalement la date ne va pas vous convenir, ce
ne sera pas comme vous voudrez, donc le plus simple, c'est que tu
gères directement avec elle, et nous on se greffe dessus.
– Bien sûr, dis plutôt que ça t'arrange.
Il colle ses lèvre sur la joue de sa femme.
– Tu es tellement forte pour tout ce qui est planification et agendas, l'amadoue-t-il.
– A d'autres. Les soucis d'organisation, c'est décidément une tare masculine.
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