Lorsqu'on me clame que la bataille contre le dopage est perdue d'avance, je réponds que bien au contraire, de plus en plus de personnes sont intéressées par cette lutte. Parlons tout d'abord de cyclisme, du fameux Tour de France, l'un des événements les plus populaires au Monde. Le troisième, après la Coupe du Monde de foot et les Jeux Olympiques, pour être plus précis.
Jusqu'à l'affaire Festina, les grands dopés du cyclisme franchissaient la ligne d'arrivée sans que mal leur arrive (à part peut-être un infarctus douteux au cours d'une montée), Riis, Merckx, Indurain, Fignon, Thévenet...
Mais depuis, des noms sont tombés, d'autres ont avoué. Les scandales éclaboussent les plus grands, Armstrong n'est (heureusement) pas passé à travers les mailles du filet, et si tant d'autres derrière suivent ou vont suivre le même chemin, c'est grâce à la conviction des insurgés qui font de ces hypocrites des rois déchus.
Si chacun d'entre nous peut montrer du doigt, ne serait-ce que par un court message moralisateur, le "public" en est forcément interpellé. Certains préféreront baisser les yeux, mais je reste convaincu qu'un jour, la peur remettra de l'ordre et de la justice dans ce tas d'inconscients. Ne pas accepter. Condamner, même dix ans après les faits. Retirer à ces tricheurs tous leurs bénéfices, en faire des parias.
D'aucuns exigeront d'emprisonner les voleurs, comme on emprisonne le malfrat capable de piller les honnêtes gens.
Et si nous devions en passer par là ?...
A ceux qui me disent que certains sports, comme par exemple le ski de fond, échappent à ce fléau, je ne peux que sourire. Le dopage touche absolument tous les sports. Dans le ski, les scandales sont venus principalement des Pays de l'Est, de la Scandinavie, mais le mal est présent partout. Si aucune discipline n'est épargnée, c'est parce que l'Homme, appâté par la réussite, est parfois prêt aux pires folies pour gagner quelques précieuses secondes, au risque d'y laisser la vie. J'ai vu des amateurs, jeunes et vieux, avaler des pilules miracles pour tenter de rivaliser avec les meilleurs. La véritable problématique est éthique, morale. Je voudrais croire que notre conscience nous impose certaines règles et que les décisions que nous prenons sont celles qui nous semblent justes. S'il y a une chose dont je sois sûr, c'est que tricher ne fait pas partie de cette vision que nous avons tous de la justice.
Et très honnêtement, ces quelques secondes valent-elles toutes ces folies ?...
La médiatisation incite contre son gré la venue de ce genre de scandales, l'argent gangrène la beauté de ce monde, la planche à billets change nos comportements, désoriente nos acte. La cupidité est une maladie qui nous est propre, à nous, Humains. Elle nous fait perdre la raison lorsque ce n'est pas la santé.
Pour en revenir à nos brebis galeuses, cesser la médiatisation n'est pas une solution en soi. Dans une vie qui se calque au rythme de l'horloge, nous avons besoin d'évasions, d'émotions, d'un soupçon de rêve, et nous avons besoin de ces sportifs allant au bout d'eux même pour nous rappeler que nous ne sommes pas les seuls à endurer les épreuves de la vie. Quelque part, ils nous aident à nous transcender et à affronter la peine de certains jours.
La propreté dans le sport serait tellement bénéfique. Nous aurions droit alors à de fabuleux retournements de situations, une course comme le Tour de France aurait alors cent héros au lien de n'en avoir qu'un. Je ne crois pas en l'homme parfait, nous avons tous des défaillances. Fatigue morale ou physique, les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Dans ces moments difficiles, s'il fallait n'avoir qu'une seule certitude, elle serait de croire que demain sera un jour meilleur.
Il y a au fond de moi beaucoup de frustrations et d'amertume lorsque les lauriers se posent sur la tête des tricheurs. Nous les connaissons tous, et lorsqu'ils tombent, personne n'est surpris. Mais ce qui me rassure, c'est que certains (pas tous, bien sûr, mais j'ose croire qu'un jour...) font le geste de trop, la piqûre de trop, ou sont impliqués dans de grandes affaires, et ils tombent. Pour ceux qui ont la foi, c'est un soulagement et une belle satisfaction.
Je ne cesse de croire, encore et toujours. Chaque fois que je prends le départ d'une course, sur la même ligne que les tricheurs, cette conviction m'aide à me dépasser.
Ils tomberont. Un jour, aujourd'hui, demain, dans dix ans, cent ans... mais ils tomberont!
Aujourd'hui, la lutte anti dopage a une longueur de retard, mais laissons le temps au temps. Un jour, à force d'entraînement, d'espoir et de conviction, les derniers rattraperont les premiers, et ce jour-là sera la plus belle gloire du Sport.
Mais surtout, ne perdons pas espoir.