Après cette longue période enfermés à la maison, j'avais décidé d'emmener les enfants faire une randonnée avec bivouac dans les hauteurs. C'était le moment de les endurcir, les mômes, de leur montrer ce que c'était que la vraie vie, dormir sur le dur dans un abri sommaire, dans la pampa lointaine, entre les loups et les ours. En finir (au moins pour une nuit) avec le confort. Aller chasser le gibier dans la forêt, allumer un feu avec deux morceaux de bois. L'aventure, la vraie, parce qu'il y en avait ras-le-bol de toutes ces émissions à deux balles à la télé, genre Koh-Lanta ou Pékin express. La vie, fallait la vivre, et pas par procuration. Rester aussi leur idole, en tant que papa qui savait tout faire, qui n'avait peur de rien, aventurier hors pair capable de survivre au Groenland juste en slip avec un canif.
On a chargé le sac avec la tente, les sacs de couchage et les tapis de sol (oui, fallait un minimum quand même), des affaires de change et des habits chauds pour les petits, moi pas besoin, un short et un T-shirt, ça suffisait, depuis le temps, j'étais endurci. J'avais néanmoins pris quelques friandises pour eux, au cas-où, et on est partis.
Dans la montée, les enfants ont gambadé devant, pendant que moi, avec mon sac à dos de trente kilos, je galérais derrière. Au bord de l'hypo, j'ai tapé dans la réserve de bonbons qui leur était destinée pour retrouver un second souffle. Une fois en haut, on a monté la tente, et je suis parti à la chasse.
Il m'a fallu deux heures pour revenir avec de la viande.
Les petits ont couru vers moi. Bravo papa, tu es le meilleur. Fais voir ce que tu as attrapé ?
Je leur ai montré ma prise. De superbes merguez, oui, les merguez, ça a des pattes et ça court dans les champs, et le premier qui me dit qu'on trouve les mêmes au supermarché, il dort tout seul dehors.
J'ai posé les merguez sur une pierre et ai commencé à faire un feu. Un demi-heure plus tard, je leur ai dit qu'elles pouvaient aussi se manger cru, que c'était très bon aussi et que ça renforçait les intestins. Et que de toute façon, les feux étaient interdits en montagne. Le repas englouti, le soleil s'est couché et j'ai commencé à me cailler. Les enfants jouaient dans la prairie.
Vous n'avez pas froid ? leur ai-je demandé.
-Non, c'est trop chouette la montagne.
Frigorifié, j'ai décrété le couvre feu général, il était temps d'aller au lit. Après une petite java en bonne et due forme, ils ont fini par s'endormir. Je me suis recroquevillé dans mon duvet pour essayer de trouver un peu de chaleur, sans succès. J'aurais bien enfilé une veste des petits, mais à part réussir à y enfiler mon pouce, c'était peine perdue. Alors j'ai pris mon mal en patience, je me suis tourné et retourné, j'ai essayé de me rapprocher de l'un qui s'éloignait immédiatement, tentative auprès de l'autre :
« papa, pousse toi, tu prends toute la place » et quand
enfin, j'ai réussi à dormir plus d'une demi heure d’affilée (au
petit matin, parce que les premiers rayons chauffaient enfin la
tente), les petits ont ouvert un œil, puis un deuxième, et m'ont
bienfait comprendre que pour eux -comme pour moi- la nuit était
terminée. Mon orgueil en a pris un coup lorsqu'ils m'ont dit que
cette nuit, ils avaient vraiment bien dormi et qu'ils avaient presque
eu trop chaud.
Je me dis que c'est parce que je dois
avoir mon poids de forme et pas un pet' de gras en trop. On se
rassure comme on peut...
Aussitôt rentrés, ils m'ont demandé
quand quand est-ce qu'on allait recommencer.
-Je sais pas,
leur ai-je répondu, désormais, pour ce genre de choses, voyez avec
maman, moi, j'ai piscine.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire